Chacun a pu observer depuis quelques années un dessèchement prématuré des feuilles de nos marronniers en été, bien avant l’arrivée de l’automne.
Ce phénomène n’est pas un effet direct de la sécheresse ou d’une maladie, mais le résultat d’un insecte minuscule : la mineuse du marronnier (de son nom savant Cameraria ohridella). Ce petit papillon, de la taille d’un moucheron, a fait son apparition en France il y a une dizaine d’années en provenance des Balkans. Personne ne s’explique pourquoi il a quitté son berceau d’origine. Très répandu en France maintenant, il s’est propagé à partir de l’est de la France où il est très présent ; il n’a pas encore atteint l’extrême sud-ouest, la Bretagne, le Massif central. Il n’a pas de prédateur naturel chez nous, ce qui explique son développement.
Cet insecte s’attaque presque exclusivement au Marronnier d’Inde (celui aux fleurs blanches), arbre originaire des Balkans lui aussi. Son cycle de développement est classique : les adultes émergent des feuilles encore au sol, au printemps, où elles ont passé l’hiver sous forme de chrysalides. En avril, quand la température moyenne atteint environ 12°C (c’est-à-dire au début de la floraison des marronniers) les adultes quittent les feuilles en décomposition et montent en voletant sur le tronc (on peut les voir en s‘approchant), pour gagner les feuilles du bas où elles pondent. Ce sont les larves, après éclosion des œufs, qui creusent des galeries dans les feuilles (d’où le nom de mineuses) et qui se transforment à leur tour en insectes adultes, créant une nouvelle génération qui va s’attaquer aux étages de feuilles situés au-dessus. Et ainsi de suite, les générations se succèdent jusqu’à coloniser tous les étages de feuilles jusqu’au sommet.
Comment lutter contre ce parasite ?
La connaissance de sa biologie conditionne et oriente les moyens de lutte. Comme la mineuse du marronnier n’a pas de prédateur naturel, la lutte biologique est impossible. La lutte chimique est efficace ponctuellement, mais il faut traiter le tronc régulièrement, ce qui ne suffit pas, vu le nombre d’insectes en cause (j’ai essayé les insecticides à base de pyrètres, sur le tronc, au moment de la migration). Les méthodes “douces” comme le piégeage en mettant des “ceintures” de papier collant sur le tronc sont d’une efficacité ridicule (j’ai piégé une centaine d’insectes quand des milliers montent à l’assaut du tronc !). Des pièges à phéromones existent, mais ils sont chers et juste suffisants pour alerter de l’arrivée de l’insecte, pas pour l’éliminer. La lutte la plus efficace est incontestablement le ramassage et le brûlage des feuilles à l’automne pour briser le cycle de l’insecte et priver les chrysalides d’abri hivernal. Leur compostage est insuffisant sauf si le compost “chauffe” suffisamment (plus de 60°C).
Faut-il s’inquiéter ?
Non. Aucune mortalité d’arbre n’a été observée dans les pays où l’insecte est présent depuis 15 ans. Il y a beaucoup de mortalité naturelle de l’insecte. Un printemps froid et humide limite les populations : on a pu observer cette année des attaques plus lentes et, d’ailleurs, il y a plus de marrons au sol et ils sont plus gros, ce qui est un signe. Le dessèchement arrive en fin d’été, alors que l’arbre a déjà réalisé l’essentiel de sa croissance annuelle. Il est possible aussi, comme souvent en biologie, que la population finisse par s’autoréguler et que des prédateurs de Cameraria apparaissent. Le ramassage des feuilles est cependant une bonne précaution.
Jean-Paul Renoux
Article très intéressant. Merci M. Renoux.
C’est très clair.
Merci Jean-Paul